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Gilles Uhlrich : En première ligne de l’éducation

Portrait de chercheur ou chercheuse Article publié le 28 octobre 2021 , mis à jour le 27 mars 2024

Gilles Uhlrich est maître de conférences en sciences de l’éducation, directeur de la Graduate School Éducation, enseignement, formation (EFE), et responsable du master 2 Formation de formateur des enseignants du second degré, mention Métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation (MEEF), pratiques et ingénierie de la formation. Il est également membre du laboratoire Complexité, innovation, activités motrices et sportives (CIAMS – Univ. Paris-Saclay, Univ. d’Orléans). Pour cet enseignant-chercheur passionné des questions d’éducation et engagé auprès de ses étudiants et de l’Université Paris Saclay, ou pour l’entraîneur sportif en rugby qu’il est également, les « temps morts » n’existent pas.

 

Immergé dans un environnement familial propice à la pratique sportive, Gilles Uhlrich aspire dès sa prime jeunesse à devenir professeur d’éducation physique. Après le bac, il passe le concours d’entrée de professeur d’éducation physique à l’Université Paris 5 (Lacretelle), mais c’est à l’Unité d’étude et de recherche en éducation physique et sportive (l’UEREPS) de l’Université Paris-Sud (aujourd’hui l’Université Paris-Saclay) à Orsay qu’il arrive, en septembre 1981. « Cette date correspond précisément au point de départ de mon parcours professionnel en technologie des pratiques physiques et sportives et en sciences de l’éducation à Saclay. »

 

Droit au but

Gilles Uhlrich obtient son Certificat d'aptitude au professorat d'éducation physique et sportive (CAPEPS) et après dix ans d’enseignement dans un collège des Yvelines, il revient à Orsay, en 1997. Au passage, il troque le terrain de football contre celui de rugby. « Daniel Bouthier, mon ancien professeur à l’UEREPS, m’avait proposé d’intervenir auprès des étudiants en pratique de rugby, et aussi de collaborer à la cellule recherche de la Fédération nationale, au moment même où démarrait la construction du centre national d’entraînement à Marcoussis, en Essonne. »  Dans cette dynamique, le jeune professeur passe l’agrégation, puis soutient en 2005 sa thèse (à Bordeaux) sur la recherche en psycho-ergonomique du rugby. Quatre ans plus tard, il devient maître de conférences en Sciences et techniques des activités physiques et sportives (STAPS) à l’Université Paris-Sud. Aujourd’hui, la totalité de son activité d’enseignement est dédiée aux masters MEEF de l’Université Paris-Saclay. 

 

De l’utilisation des outils dans l’enseignement

Au sein du laboratoire CIAMS, Gilles Uhlrich travaille sur les problématiques de l’enseignement des pratiques sportives et l’utilisation des outils dans les processus d’apprentissage. Ces outils sont très mobilisés par les enseignants, notamment ceux d’éducation physique et sportive. Gilles Uhlrich étudie par exemple les effets des instruments d’observation des jeux de rugby, comme les vidéos-statistiques. 

« C’est la question des transformations des conceptions qui est posée, que l’on nomme la "genèse instrumentale". » L’enseignant-chercheur collabore dans le même temps avec le laboratoire de psychologie du travail du Conservatoire national des arts et métiers (Cnam) et s’implique également au sein de l’Association pour la recherche sur l'intervention en sport (ARIS) dont il est le vice-président.

 

Les STAPS, pilier de l’Université Paris-Saclay

La composante STAPS de l’Université Paris-Saclay est une des plus importantes en France. Elle se distingue notamment par d’excellents résultats au CAPEPS, mais c’est loin d’être son seul débouché. « Les métiers du sport se sont diversifiés depuis plusieurs années et les STAPS offrent des perspectives professionnelles dans le management, la rééducation, l’entraînement, etc. que les étudiants découvrent petit à petit », affirme Gilles Uhlrich. Une évolution qui va de pair avec la sélection des étudiants dans Parcoursup, qui eux aussi ont des profils de plus en plus divers, parfois de haut niveau scientifique, comme a pu le constater l’enseignant-chercheur. 

 

Un collectif en devenir

Lors de la création des Écoles supérieures du professorat et de l'éducation (ESPE) en 2013, puis des Instituts nationaux supérieurs du professorat et de l'éducation (INSPE) en 2019, Gilles Uhlrich assure le lien entre l’Université Paris-Sud et l’Académie de Versailles, et prend différentes responsabilités administratives et pédagogiques. Cet engagement l’amène tout naturellement à la direction de la Graduate School EFE à la rentrée universitaire 2020/2021. 

Avec 1 200 étudiants et 200 enseignants, cette Graduate School regroupe onze parcours et sept mentions de master portés par autant de laboratoires. « Nous travaillons en transversalité avec des collègues qui ont pour point commun d’étudier les aspects d’enseignement de leur discipline. Nous sommes d’ailleurs en train de les cartographier. » Plusieurs événements sont inscrits à son agenda cette année. « Nous organisons en décembre notre premier workshop recherche en même temps que démarre une série de séminaires en collaboration avec la Maison des sciences de l’Homme (MSH) Paris-Saclay. Nous prévoyons aussi en juin prochain une semaine de la recherche consacrée aux problématiques d’éducation. » Et après son report pour cause de covid, la cérémonie de remise des diplômes de master aura lieu en mars 2022. « En dépit des identités disciplinaires marquées, on voit bien qu’émerge une identité "Paris-Saclay". »

 

Ouverture internationale

La carte internationale jouée par le master MEEF est un autre atout qui n’existait pas auparavant. « Jusqu’en 2020, le concours du Certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement du second degré (CAPES) s’effectuait à la fin de la première année de master, la seconde année étant consacrée au stage professionnel, explique Gilles Uhlrich. Aujourd’hui, le concours est programmé en master 2, ce qui libère le master 1 pour effectuer un séjour à l’étranger. » Tous les masters de l’enseignement bénéficient désormais des programmes Erasmus ou des échanges avec les pays partenaires, notamment en s’appuyant sur le réseau EUGLOH. « À travers la Graduate School, nous réfléchissons même à soutenir des initiatives individuelles d’étudiants qui auraient envie d’aller voir comment les sciences de l’éducation sont envisagées ailleurs, renchérit l’enseignant-chercheur. En intégrant le fait que leur métier va évoluer, ils s’autorisent aujourd’hui à faire des choses qui ne sont pas immédiatement utiles à leur carrière et n’hésitent plus à partir un semestre à l’étranger. » Gilles Uhlrich encourage donc ses étudiants à adopter cette posture de recherche et d’ouverture au monde, « pour mieux conceptualiser ce qu’il se passe chez nous ». 

 

La France hors-jeu ?

En comparaison avec d’autres pays comme le Canada, la Suisse ou la Belgique, la France a longtemps sous-estimé la recherche sur les métiers de l’éducation. « Ici, nous pensions que l’éducation était innée ! Il y a quelques années, une de mes collègues avait étudié les systèmes scolaires de différents pays, ce qui m’avait fortement marqué, confie Gilles Uhlrich. Ici, nous apprenons surtout aux élèves à se taire alors qu’ailleurs, on leur apprend à s’exprimer par tous les moyens possibles. En éducation physique et sportive, nous y sommes particulièrement sensibles, car c’est une discipline "en mouvement" avec des cours qui font du "bruit", par opposition aux mathématiques par exemple. Or, nous observons aujourd’hui que celui qui mobilise son corps travaille mieux. »

Un constat que Gilles Uhlrich a érigé en principe de vie. Il continue à entraîner les jeunes rugbymen du RC de Massy-Essonne, qui pourvoie régulièrement l’équipe de France en joueurs (Mathieu Bastareaud, Yacouba Camara, Sekou Macalou ou Cameron Woki). « Je suis surtout fier d’avoir accompagné autant de jeunes dans leur cursus de vie. Ils sont devenus champions, sportifs, professeurs ou même slameurs (Fabien Marsaud, alias Grand Corps Malade, est un de ses anciens étudiants). Lorsque nous nous croisons des années après, nous avons la même étincelle dans les yeux », conclut Gilles Uhlrich.