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Circul'egg revalorises eggshells

Innovation Article published on 16 June 2023 , Updated on 16 June 2023

Alors que de nombreux secteurs industriels tentent de verdir leur production en choisissant des matières premières biosourcées et renouvelables, la start-up Circul’egg, créée par un ancien étudiant d’AgroParisTech, propose une solution clé en main : les coquilles d'œufs. Avec la mise à disposition de différentes molécules d’intérêts, la jeune entreprise se développe rapidement.

Jeune entreprise fondée en 2020 par un ancien étudiant d’AgroParisTech, Yacine Kabeche, Circul’egg est une start-up qui prend de l’ampleur. Dans une démarche d’économie circulaire, elle revalorise les coquilles d'œufs délaissées par les casseries. Ces dernières récupèrent les blancs et les jaunes d’œufs, pour les revendre à l’industrie agroalimentaire, qui jettent ensuite les coquilles. Avec 15 milliards d'œufs produits chaque année en France, ce sont 40 000 tonnes de coquilles qui finissent épandues, ou la majorité du temps incinérées. « Nous travaillons avec 80 % des 53 casseries françaises, dont la plupart sont situées entre la Bretagne et la Normandie », précise Yacine Kabeche.

 

Extraire des composés d’intérêt

Circul’egg collecte les coquilles auprès des différentes casseries partenaires. Elles sont par la suite concassées afin d’obtenir un mélange homogène. À travers un procédé mécanique, qui proscrit l’utilisation de produits chimiques, la coquille est séparée de la membrane qui en recouvre l’intérieur. La start-up récupère environ 97 % de coquille, 3 % de membrane et une infime partie de « jus de coquille », c’est-à-dire des résidus de blanc d’œuf. Les deux fractions principales sont ensuite à nouveau broyées pour être réduites en une fine poudre.

Les coquilles sont composées à 96 % de carbonate de calcium, extrait habituellement des carrières de calcium. Cette matière est très prisée par les industries de l’alimentation humaine et animale comme source de calcium dans les compléments alimentaires, mais aussi par la cosmétique et le secteur du bâtiment. « Au début, nous ne visions que les marchés alimentaires qui convoitaient notre produit, car il présente une faible teneur en métaux lourds et une excellente biodisponibilité du calcium. Nous avons été surpris de constater que le secteur du BTP était intéressé. Le carbonate de calcium y sert d’agent de charge fonctionnelle dans les peintures, les meubles ou encore les sols. Le BTP est très demandeur de matière première décarbonée, biosourcée et recyclée pour améliorer son empreinte environnementale », développe le jeune PDG.

Quant à la membrane, elle est particulièrement riche en protéines, comme le collagène, mais aussi en chondroïtine sulfate et en acide hyaluronique. Des molécules qui sont très recherchées par l’industrie des compléments alimentaires, pour humains et animaux, et de la cosmétique. Les produits de Circul’egg permettent de remplacer des matières premières habituellement synthétisées à partir de carcasses d’animaux, parfois importées de l’autre bout du monde. Autre avantage : la poudre de membrane contient les trois biomolécules, ce qui évite aux industriels de se procurer les produits séparément.

« Notre objectif reste de vraiment valoriser l’entièreté des coquilles d’œufs. Nous visons donc des marchés avec une certaine volumétrie, capables d’acheter des quantités suffisantes. Nous ne sommes pas intéressés par les marchés de niches, même s’ils paient cher, car ils nécessitent trop peu de volume », ajoute Yacine Kabeche.

 

Une rapide montée en puissance

Avec un procédé de séparation breveté en 2021, Circul’egg a rapidement changé d’échelle, passant du laboratoire au pilote puis à l’unité industrielle. En 2022, la start-up réalise une levée de fonds de près d’un million d’euros afin de développer une unité pilote à Clichy. « Notre unité est dotée d’une capacité de traitement de coquilles d'œufs de 250 kg par jour. Le but était de réaliser un petit scale-up (changement d’échelle) et de donner des échantillons à nos clients pour qu’ils effectuent des tests avec notre produit. Les résultats ont été positifs et nous avons reçu de nombreuses commandes. Nous avons donc décidé de passer au stade industriel », se réjouit le PDG.. Sans perdre de temps, la jeune entreprise lance une nouvelle levée de fonds en 2023, cette fois-ci à destination de son usine de taille industrielle qui se situera à proximité de 80 % des casseries dans le quart nord-ouest français, à Janzé, près de Rennes. Elle sera capable, à terme, de traiter une tonne de coquilles par heure. Pour Yacine Kabeche : « L'objectif est de récolter quatre millions d’euros pour lancer l’industrie de façon plus pérenne. Nous sommes soutenus par des fonds d’investissement, comme BPI France, et différents business angels qui nous apportent à la fois un soutien financier et des expertises. »

 

De nombreux soutiens

La start-up reçoit de nombreux soutiens. En premier lieu, celui de l’école qui l’a vu naître, AgroParisTech, à travers l'expertise d’AgroParisTech Innovation. Circul’egg a également signé un accord de recherche avec AgroParisTech et obtenu le statut de Jeune entreprise universitaire (JEU). « Nous sommes très attachés à AgroParisTech. Circul’egg y est née, ses racines restent là-bas », rappelle Yacine Kabeche.

Elle bénéficie aussi des compétences de la direction de la recherche, de l’innovation et du transfert technologique (DRITT) sur des aspects marketing et business. En 2022, elle a également été lauréate du concours d'innovation i-Lab et du programme FrenchTech AGRI20. Yacine Kabeche poursuit : « Nous nous entourons de mentors qui travaillent dans d’autres entreprises et nous apportent une expérience dans différents domaines. »

 

Conquérir de nouveaux marchés

Ces nombreux soutiens encouragent la start-up à explorer d’autres chemins, l’unité industrielle de Janzé n’étant que la première pierre d’un grand édifice. Plusieurs pistes sont en cours de réflexion auprès des quatre membres de l’équipe dirigeante (Yacine Kabeche, Justine Lecallier, Samuel Olivier et Kristen Donnart). « Nous travaillons en ce moment sur une implantation d’usines à l’intérieur même des casseries. C’était ce que nous voulions faire en premier lieu, mais la demande de nos clients étant particulièrement pressante, nous avons décidé de couper la poire en deux avec l’ouverture de l’unité industrielle. Si le modèle d’une unité intégrée est viable à la fois économiquement et environnementalement, nous le ferons », précise Yacine Kabeche. En parallèle, l’entreprise souhaiterait implanter une unité industrielle proche des 20 % des casseries restantes, présentes dans la région Nord-Pas-de-Calais.

Enfin, Circul’egg ne souhaite pas se contenter des coquilles d’oeufs. Dans sa logique d’économie circulaire, la start-up envisage de revaloriser d’autres coproduits, tels que les peaux de fruits, les coquilles d'huîtres, les restes de brasseries, etc. « Nous connaissons les attentes du marché, la réglementation et la partie recherche et développement. En fonction du coproduit, nous développerons le process. Nous n’en sommes pas encore à entamer de nouveaux projets, mais ce serait dommage de ne pas utiliser notre expertise plus largement », conclut le fondateur.